En cette période automnale, peu d'activité. Il faut dire que le soleil se lève tard vers 7h45 et se couche tôt vers 17h10. Et souvent la faune est active avant le lever soit après donc l'observation reste difficile. Il faut également prendre en compte que la chasse est présente sur une grande partie des territoires et donc par mesure de sécurité, on évite ces secteurs. Ce qui laisse peu de place à l'observation. Toutefois, il y a toujours des surprises si on pousse la chance et que l'on sort de la zone de confort.
Et contrairement aux autres rapaces diurnes, il y a un rapace nocturne qui prépare sa période de reproduction à partir de fin novembre pour un accouplement vers fin janvier/février. Ce rapace est le super prédateur: le Hibou Grand-Duc.
Le Hibou Grand-Duc est très loquace en période de reproduction et chante à la tombée de la nuit (et pendant). Son chant est très reconnaissable et ne permet aucune ambiguïté. Son chant résonne dans la nuit noire à travers les vallons et forêts jusqu'à des distances supérieures à 1 km. L'entendre est toujours un moment fort et on se sent moins seul dans la nuit. Le mâle et la femelle ont sensiblement le même chant mais une octave supérieur pour la femelle. Il est alors très facile de distinguer le mâle de la femelle et d'écouter les appels et réponses des individus. Pour écouter son chant: Chant
Le Hibou Grand-Duc est supra prédateur au sommet de la chaine alimentaire. C'est un rapace se nourrissant de viandes et attrape à peu près tout ce qui bouge dans la limite du poids qu'il peut soulever. Cela s'étend du micro-mammifère aux petits cervidés de type faon, marcassins, renardeaux... Il peut également prédater des poussins d'aigle en l'absence des parents. Lorsque le Grand-Duc est présent en zone péri-urbaine, il capture rats et surmulots. Il existe une hypothèse forte sur la capture des chats divaguant dans les zones de transition ville/nature. C'est également un opportuniste, il est capable d'adapter sa nourriture en fonction de son lieu de vie. On a remarqué, dans une aire, la présence d'os de canards. L'étude a montré la présence d'une mare à quelques centaines de mètre de son aire, un étang abritant des cols verts. Les exemples de ce type ne manquent pas !
La particularité des rapaces nocturnes, et en l'occurence des Grand-Duc, est un vol parfaitement silencieux favorisant la surprise pour ses proies. Inaudible dans le déplacement, cela permet d'attraper plus facilement une proie. Les plumes des ailes sont dentelées et les matériaux constituant ces plumes sont des matériaux de velours. Elles sont présentes sur les ailes et les pattes absorbant les fréquences sonores. La structure d'accroche des plumes est multicouche avec une structure poreuse permettant une absorption de l'onde sonore. La forme de l'aile permet d'atténuer la turbulence sur le bord d'attaque de celle-ci supprimant ainsi l'effet de tourbillon d'air qui est à l'origine du son ! Ainsi le plumage est d'une haute technologie pour rendre le vol totalement silencieux.
Sa vision est également exceptionnelle. Ses grands yeux de couleur rouge orangé ressortent nettement. Enchâssés dans le crâne, ils ont une mobilité latérale limitée mais la tête peut tourner sur elle-même jusqu'à 270°. La souplesse du cou s'explique par la présence de 14 vertèbres cervicales (contre 7 sept chez l'humain), et les deux artères carotides se placent au centre du cou, et non pas sur les côtés. Il faut souligner que les yeux représentent 5 % du poids de son corps. En comparaison, si nous avions des yeux proportionnellement aussi grands que ceux de ce hibou, nos orbites auraient la taille d’oranges.
Comme tous les rapaces, le Hibou grand-duc possède 2 paupières : une paupière transparente protège les yeux pendant les vols à grande vitesse ou pendant le repas, tandis que l’autre, opaque, est comparable à la nôtre.
Enfin si on devait parler de sa taille, la aussi c'est exceptionnel. Une hauteur de 80 cm pour une envergure de 1m70 à 2m et un poids de 1.6 à 2Kg. Le dimorphisme sexuel est très net entre la femelle et le mâle. La femelle étant 30 % plus grosse que le mâle. Pour avoir des renseignements complémentaires sur le Grand Duc.
Tout cela pour arriver à cette observation réalisée à la fin de journée en début de nuit de novembre. Je me suis posté près d'une zone ou je pensais pouvoir l'observer et donc valider sa présence. J'ai attendu d'abord le coucher du soleil pour commencer à scruter dans les falaises. J'ai rapidement repéré une zone susceptible d'abriter une aire ou un perchoir de repos. L'heure passe, le soleil se couche rapidement. Comme je ne me suis pas très couvert, je commence à sentir la fraicheur au milieu de la végétation (bien fait pour moi!) mais je persiste. La lumière est vraiment basse, je distingue uniquement les barres rocheuses de calcaire. Et 30 min après le coucher du soleil, alors que je commence à avoir froid (j'étais bien trempé pour avoir fait une belle petite marche d'approche), je me donne encore 5 min... et à mon grand regret, je commence à envisager le retour quand un cri vient déchirer le vallon ! Un Grand-Duc ! Un deuxième cri vient de nouveau de se faire entendre! C'est confirmé le Hibou est là ! Et je le vois sortir de la zone prospectée, il vole et se pose au dessus de la barre rocheuse ! je suis sous l'émerveillement ! il s'ébroue, tourne la tête et se décale légèrement ! Heureux, je reprend le chemin de nuit, je me force à marcher sans frontale pour que mes yeux s'habituent à la nuit et pour éviter tout dérangement lumineux, je ne la mettrai uniquement vers la fin sur des parties un peu casse-guele pour assurer la sécurité. Mais je rentre totalement émerveillé et plein de joie. De nouvelles sessions auront lieu ! mais en gardant toujours en tête de ne pas déranger, la photo oui mais en respectant le lieu de vie, pas la peine d'aller le déranger pour une photo.... J'ai tenté une photo d'ambiance, ce n'est pas une superbe photo mais un super souvenir...